Diferencia entre revisiones de «Carta a Godofredo Iommi 13 feb. 65»

De Casiopea
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le 13 février
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Cher Godo,
Merci de ta longue lettre, qui m’a, bien sûr, fait tant plaisir. Pancho m’a parlé de votre projet de mise en scène de L’<u>Orestie</u>.
Je voudrais pouvoir te dire bien des choses qui sont tous au fond. Mais je ne sais si je pourrai. J’essaye.
D’abord, il faut te raconter ce qui m’est arrivé l’autre mois environ, juste après avoir envoyé le cahier-Améréide.
Je suis sorti du métro, j’ai commencé à marcher et je suis aperçu que j’étais immobile, et que le mouvement de mes jambes faisait dérouler le trottoir, la rue, Paris, la terre, cela pendant tout le temps jusqu’à ce que je rentre chez moi.
Maintenant je saute :
Cher Godo, je suis du moins en partie philosophe. Or il n’y a pas de place pour un philosophe à l’Améréide, à la phalène, du moins en tant que philosophe – à la véritable Améréide. Le philosophe peut bien sûr être là <u>pour voir</u>, pour observer, pour expérimenter. Mais alors il ne voit <u>rien</u>, ou plus exactement il voit son expérimentation.
Ce que je te dis là, ce ne sont pas des difficultés subjectives.
De celles-là, je m’en fous. Mais c’est la difficulté objective philosophique. Si je suis là, il y a automatiquement deux « objectivité » : l’objectivité de la muse – l’objectivité de la pensée QUI NE SONT PAS <u>UNE</u>
Parce que Godo, saches-le : dire « la Muse c’est la voix du destin » c’est une <u>réduction de la muse à la pensée</u>.
D’où est-ce que je peux te dire cela ? Je ne le sais même pas. Mais vous vous trompez – vous êtes victimes d’une fantastique force protéique de la pensée, si vous croyez cela <u>aussi</u>.
<strike>Aussi</strike> Je dois donc <u>dire</u> aussi la parole qui équilibre:
LA MUSE N’EXISTE PAS
Il faut penser: la muse est la voix du destin <u>et</u> la muse n’existe pas <u>ensemble</u>, alors vous avez la véritable pensée de la muse.
Or Godo, j’ai, avec toi, vu de la muse. Come étrangère lointain pour moi, sans aucun choc ce n’est pas un fantôme, ce n’est pas quelqu’un que je croyais mort – tout simplement là comme la tour Eiffel où je n’ai jamais envie de monter.
Alors qu’est-ce qui se passe à l’Améréide. Je ne veux pas – jamais – être là <u>pour voir</u> ce qui va se passer. Ce serait l’attitude du vrai philosophe ( je me trompe, car le vrai philosophe n’est même pas là – il travaille [ce n’est pas ironique, c’est vrai, il travaille, moi <u>non</u>, moi je m’alourdis de miel – lorsque je rentre, je le sens, je suis plus riche – mais je ne suis pas venu non plus pour cela, ça me dégoute presque ].
Car tu sais, je pourrais très bien interpréter moi aussi tout ce qui s’est passé, faire apparaître un <u>sens</u> différent, como Edi <u>interprète</u> Οὗ δἠ ἕυεΧ’ ἡ πολλἠ σπυδἠ τὀ ἀληθεἱαζ ἰδεἱυ πεδἱου. Ce que je ne fais pas, non pas seulement parce que j’y ai moins « droit », non pas parce que l’entreprise l’emporte sur une « lucidité » soupçonnable de lâcheté – mais sont simplement parce que je préfère interpréter ailleurs : <u>j’aime</u> l’Améréide.
Bon.
Tu comprends, il ne faut pas que l’Améréide me devienne l’Alternative, c’est-à-dire la solution de rechange. Si je regarde bien, pour moi, l’Améréide à bien été <u>peut être un instant infinitésimal</u>. Lo único que vale la pena.
Au moment oú je me suis décidé – les démarches, – jusqu’au départ une vraie joie : alors que je partais en ne sachant que le nom (c’est à Buenos-Ayres que Jorge m’a dit qu’on partirait sans doute pour Punta-Arenas et remonter ensuite). À ce moment là, avant partir, c’était la joie totale. Entièrement gratuit : je partais peut-être seulement pour vous voir tous, peut-être aussi pour immense voyage.
J’ai beaucoup pensé par la suite. Il est bien sûr possible d’<u>aider</u> en mettant en usage le mode de pensée philosophique. Mais ce qui est impossible c’est <u>penser</u> vraiment en philosophe.
Ce n’est pas un faux-problème. Car le pur philosophe dira: la seule chose qui compte c’est poursuivre la tâche <strike>pensitiffe</strike> pensitive – ou que la clé de <u>notre</u> monde est là.
Or personne ne peut parler ainsi : il n’y a pas qu’<u>une</u> chose qui vaille la peine. Et où je me trouve, je dois reconnaître qu’il est impossible d’être aux deux à la fois : cela ne vaut pas la peine.
Je suis heureux si l’Améréide se présente comme elle est – sans « réflexions ». Peut-être suis-je dans une curieuse situation de « sin option », Alberto ! Améréida – et pensée, sans qu’il y ait aucune option – aucun choix à faire. Je ne choisis pas la pensée – peut être est-ce déjà fait – ; mais de manière que ce déjà - « choisi » ( en fait absence de choix – peut-être « vocation » ) me place devant l’Améréide sans choix <u>à faire</u>. En fait oui !
Je n’ai pas choisi d’aller à l’Améréide. Cela s’est fait. C’est pourquoi d’ailleurs je suis parti \ de l’Améréide ∕ aussi plus tôt : car \ pour rester ∕ j’aurais dû <u>choisir</u> de rester. Mon départ, Godo, a été un refus de me laisser citer dans la liberté. C’est encore l’antérieur au sin-option \ = le sin-option « passif », où il y a 2 options égales ∕. Je suis parti comme les fruits tombent : par mûrissement ou pourriture.
Godo, quand je dis que l’Améréide n’est pas pour moi l’Alternative, ce que je veux dire c’est cela.
Bon. Je m’aperçois que je débats, je crois, mes problèmes. Peut-être. Mais j’ai déjà tout oublié.
Écris moi « sur », « de » l’Améréide. Nous l’avons commencée. Nous avons articulé \ une lettre ? / un signe. Nous avons fait ce que nous avons pu. C’est parce que ça dépanne, comme une feuille d’un livre.
Cher Godo je ne suis pas d’accord quand tu dis que Hörlderlin ne pense pas la tragédie. Il la pense suivant une perspective de calcul. Calcul de la tragédie. Ce qui est <u>différent</u> de la tragédie.
<u>Calcul de</u> l’Améréide différent de l’<u>Améréide</u> !
Abrazos a toi, et à tous aussi
fédier
Or de même que le calcul de la tragédie ne rende pas la tragédie possible, mais compréhensible, DE MÊME, le calcul de l’Améréide rend l’Améréide possible. Qu’est ce que je <u>dis</u>, Godo ??
Godo ?? Godo ??
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Embrasse Ximena, embrasse les filles, Godo, embrasse les fils, et tous ceux autour, les femmes, Alberto, Fabio, Pepe, Tito, le cher Claudio, et embrasse Edi
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Sin option<br>
véritablement passif parce qu’il y a 2 options possibles égales.<br>
( L’Âne de Buridan )
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<small>[[Fondo Iommi-Amunátegui]] / [http://wiki.ead.pucv.cl/index.php/Fondo_Iommi-Amun%C3%A1tegui#Carpeta_Negra Carpeta Negra]:</small>
<small>[[Fondo Iommi-Amunátegui]] / [https://wiki.ead.pucv.cl/Fondo_Iommi-Amun%C3%A1tegui#Carpeta_Negra Carpeta Negra]:</small>


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Revisión actual - 16:32 1 mar 2018



TítuloCarta a Godofredo Iommi 13 feb. 65
AutorFrançois Fédier
Páginas2
Imágenes4
Ancho 21 cms.
Alto 27 cms.
Fecha1965/02/13
ColecciónCorrespondencia
FondoIommi-Amunátegui
ConjuntoCarpeta Negra
Número de Ingreso003
PDFArchivo:Carta a Godofredo Iommi 13 feb. 65.pdf
Código
IOM-LET-IAM-CNE-CAR-965-003


le 13 février



Cher Godo,

Merci de ta longue lettre, qui m’a, bien sûr, fait tant plaisir. Pancho m’a parlé de votre projet de mise en scène de L’Orestie.

Je voudrais pouvoir te dire bien des choses qui sont tous au fond. Mais je ne sais si je pourrai. J’essaye. D’abord, il faut te raconter ce qui m’est arrivé l’autre mois environ, juste après avoir envoyé le cahier-Améréide.

Je suis sorti du métro, j’ai commencé à marcher et je suis aperçu que j’étais immobile, et que le mouvement de mes jambes faisait dérouler le trottoir, la rue, Paris, la terre, cela pendant tout le temps jusqu’à ce que je rentre chez moi.

Maintenant je saute :

Cher Godo, je suis du moins en partie philosophe. Or il n’y a pas de place pour un philosophe à l’Améréide, à la phalène, du moins en tant que philosophe – à la véritable Améréide. Le philosophe peut bien sûr être là pour voir, pour observer, pour expérimenter. Mais alors il ne voit rien, ou plus exactement il voit son expérimentation.

Ce que je te dis là, ce ne sont pas des difficultés subjectives.

De celles-là, je m’en fous. Mais c’est la difficulté objective philosophique. Si je suis là, il y a automatiquement deux « objectivité » : l’objectivité de la muse – l’objectivité de la pensée QUI NE SONT PAS UNE

Parce que Godo, saches-le : dire « la Muse c’est la voix du destin » c’est une réduction de la muse à la pensée.

D’où est-ce que je peux te dire cela ? Je ne le sais même pas. Mais vous vous trompez – vous êtes victimes d’une fantastique force protéique de la pensée, si vous croyez cela aussi.

Aussi Je dois donc dire aussi la parole qui équilibre:

LA MUSE N’EXISTE PAS

Il faut penser: la muse est la voix du destin et la muse n’existe pas ensemble, alors vous avez la véritable pensée de la muse.

Or Godo, j’ai, avec toi, vu de la muse. Come étrangère lointain pour moi, sans aucun choc ce n’est pas un fantôme, ce n’est pas quelqu’un que je croyais mort – tout simplement là comme la tour Eiffel où je n’ai jamais envie de monter.

Alors qu’est-ce qui se passe à l’Améréide. Je ne veux pas – jamais – être là pour voir ce qui va se passer. Ce serait l’attitude du vrai philosophe ( je me trompe, car le vrai philosophe n’est même pas là – il travaille [ce n’est pas ironique, c’est vrai, il travaille, moi non, moi je m’alourdis de miel – lorsque je rentre, je le sens, je suis plus riche – mais je ne suis pas venu non plus pour cela, ça me dégoute presque ].

Car tu sais, je pourrais très bien interpréter moi aussi tout ce qui s’est passé, faire apparaître un sens différent, como Edi interprète Οὗ δἠ ἕυεΧ’ ἡ πολλἠ σπυδἠ τὀ ἀληθεἱαζ ἰδεἱυ πεδἱου. Ce que je ne fais pas, non pas seulement parce que j’y ai moins « droit », non pas parce que l’entreprise l’emporte sur une « lucidité » soupçonnable de lâcheté – mais sont simplement parce que je préfère interpréter ailleurs : j’aime l’Améréide.

Bon.

Tu comprends, il ne faut pas que l’Améréide me devienne l’Alternative, c’est-à-dire la solution de rechange. Si je regarde bien, pour moi, l’Améréide à bien été peut être un instant infinitésimal. Lo único que vale la pena.

Au moment oú je me suis décidé – les démarches, – jusqu’au départ une vraie joie : alors que je partais en ne sachant que le nom (c’est à Buenos-Ayres que Jorge m’a dit qu’on partirait sans doute pour Punta-Arenas et remonter ensuite). À ce moment là, avant partir, c’était la joie totale. Entièrement gratuit : je partais peut-être seulement pour vous voir tous, peut-être aussi pour immense voyage.

J’ai beaucoup pensé par la suite. Il est bien sûr possible d’aider en mettant en usage le mode de pensée philosophique. Mais ce qui est impossible c’est penser vraiment en philosophe.

Ce n’est pas un faux-problème. Car le pur philosophe dira: la seule chose qui compte c’est poursuivre la tâche pensitiffe pensitive – ou que la clé de notre monde est là.

Or personne ne peut parler ainsi : il n’y a pas qu’une chose qui vaille la peine. Et où je me trouve, je dois reconnaître qu’il est impossible d’être aux deux à la fois : cela ne vaut pas la peine.

Je suis heureux si l’Améréide se présente comme elle est – sans « réflexions ». Peut-être suis-je dans une curieuse situation de « sin option », Alberto ! Améréida – et pensée, sans qu’il y ait aucune option – aucun choix à faire. Je ne choisis pas la pensée – peut être est-ce déjà fait – ; mais de manière que ce déjà - « choisi » ( en fait absence de choix – peut-être « vocation » ) me place devant l’Améréide sans choix à faire. En fait oui !

Je n’ai pas choisi d’aller à l’Améréide. Cela s’est fait. C’est pourquoi d’ailleurs je suis parti \ de l’Améréide ∕ aussi plus tôt : car \ pour rester ∕ j’aurais dû choisir de rester. Mon départ, Godo, a été un refus de me laisser citer dans la liberté. C’est encore l’antérieur au sin-option \ = le sin-option « passif », où il y a 2 options égales ∕. Je suis parti comme les fruits tombent : par mûrissement ou pourriture.

Godo, quand je dis que l’Améréide n’est pas pour moi l’Alternative, ce que je veux dire c’est cela.

Bon. Je m’aperçois que je débats, je crois, mes problèmes. Peut-être. Mais j’ai déjà tout oublié.

Écris moi « sur », « de » l’Améréide. Nous l’avons commencée. Nous avons articulé \ une lettre ? / un signe. Nous avons fait ce que nous avons pu. C’est parce que ça dépanne, comme une feuille d’un livre.

Cher Godo je ne suis pas d’accord quand tu dis que Hörlderlin ne pense pas la tragédie. Il la pense suivant une perspective de calcul. Calcul de la tragédie. Ce qui est différent de la tragédie. Calcul de l’Améréide différent de l’Améréide !


Abrazos a toi, et à tous aussi

fédier


Or de même que le calcul de la tragédie ne rende pas la tragédie possible, mais compréhensible, DE MÊME, le calcul de l’Améréide rend l’Améréide possible. Qu’est ce que je dis, Godo ??

Godo ?? Godo ??


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Embrasse Ximena, embrasse les filles, Godo, embrasse les fils, et tous ceux autour, les femmes, Alberto, Fabio, Pepe, Tito, le cher Claudio, et embrasse Edi

Sin option
véritablement passif parce qu’il y a 2 options possibles égales.
( L’Âne de Buridan )

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Fondo Iommi-Amunátegui / Carpeta Negra:

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